Dire Straits au sommet avec Brothers In Arms

Dans les années 70 où le hard rock de Led Zeppelin et AC/DC se dispute la gloire avec le psychédélique Pink Floyd, Dire Straits fait presque figure de contre-courant. Délaissant les « gros sons » du hard rock, le groupe se fraie une place au sein de la scène rock, grâce au tube Sultans Of Swing et au talent de guitariste de Mark Knopfler, futur modèle pour des générations de musiciens. Cinq albums plus tard, en 1985, Dire Straits sort Brothers In Arms. Immense succès commercial glanant plus de 30 millions d’exemplaires vendus, ce disque à l’atmosphère planante entrainera une tournée éreintante pour le groupe, qui se séparera progressivement. Que reste-t-il de Brothers In Arms, trente-cinq ans plus tard ?

Débutant par So Far Away, le disque annonce une atmosphère calme, où des chœurs soutiennent la voix tranquille de Mark Knopfler. Prenant le temps d’installer le décor, cette première chanson est une sorte de mise en bouche avant d’envoyer la suite avec Money For Nothing.
L’un des tubes planétaires de Dire Straits commence par quelques voix en écho et une batterie qui s’échauffe, avant de lancer l’un des riffs les plus iconiques du rock. Money For Nothing ironise sur la vie de rocker en reprenant les remarques répétées sans cesse par des sceptiques. Sting rejoint Knopfler sur les refrains de cette chanson dont la version écourtée est reprise par les radios depuis sa parution.

Après le sympathique Money For Nothing, arrive Walk Of Life, elle aussi bien connue. Son son roots la rend indéniablement irrésistible. La basse de John Illsley est particulièrement appréciable, son tempo rapide dynamise le morceau, déjà survolté par rapport au répertoire de l’album. Dire Straits s’empresse de ralentir la cadence avec le sublime Your Latest Trick. Le saxophone de Michael Brecker se mêle à la voix quasi désabusée de Knopfler, provoquant un climat planant, d’une quiétude grandiose. Les paroles regorgent d’images sombres sur l’alcoolisme et la solitude. Un des sommets du disque.

La chanson Why Worry surfe sur cette vague mélancolique et paisible commencée avec Your Latest Trick. Presque à l’arrière-plan, la voix de Mark Knopfler laisse le feu des projecteurs à sa guitare, d’une douceur incomparable. Il règne alors un calme olympien durant ces 8 minutes. Une autre guitare et la discrète batterie de Terry Williams arrivent parfaire l’équilibre de Why Worry.

Aussi planante, la mystérieuse Ride Across The River, première chanson de la face B, se démarque par un clavier omniprésent et par une guitare moins timide, rehaussant le rythme de l’album lors d’un solo fort sympathique. L’ajout de quelques effets de sons assez particuliers nuit peut-être au morceau.

Tranchant avec le calme ambiant, Dire Straits renoue avec le rock roots pour notre plus grand plaisir avec The Man’s Too Strong.

Avant dernière chanson de Brothers In Arms, One World surprend, d’abord par son aspect plus impétueux et par sa durée, moins de quatre minutes, ce qui fait figure d’exception dans un tel album où les autres singles dépassent aisément les cinq, voire les huit minutes. Ce sentiment de demi-teinte par rapport au reste de l’album se fait vite évincé en entendant la chanson-titre qui clôt l’album.

Durant sept minutes, l’imperturbable Dire Straits livre une sublime création, où la guitare électrique reconnaissable de Knopfler n’a jamais atteint une telle sérénité. Répondant au chanteur, la partition de l’instrument iconique du groupe, magnifique et magnifié, s’avère d’autant plus savoureuse qu’elle est soulignée par un somptueux orgue. Les paroles désarmantes nous hape dans un pertinent discours pacifiste. Brothers In Arms clôt l’album éponyme avec la délicatesse poignante d’un groupe au sommet.

En bref
Trente-cinq ans plus tard, le somptueux disque n’a rien perdu de sa superbe, reste un indispensable pour tout guitariste et un incontournable pour tout rocker. Le jeu inégalable du virtuose Mark Knopfler participe à l’atmosphère planante de Brothers In Arms, d’un charme irrésistible.